La RE2020 est la norme énergétique du bâtiment neuf français. Cette liste de critères qu’il faut satisfaire ou au contraire ne pas dépasser représente un challenge pour les constructeurs et s’affirme comme l’un des règlements énergétiques les plus ambitieux d’Europe. On peut donc s’interroger sur les liens qui unissent ou non la RE2020 avec les matériaux biosourcés. Ces derniers étant en effet un aout afin de construire des logements plus respectueux de l’environnement. Voici notre dossier pour découvrir certaines pistes de réflexion quant à l’amélioration du rapport entre RE2020 et matériaux biosourcés.
Matériaux biosourcés et RE2020 : les définitions
Afin de bien comprendre pourquoi matériaux biosourcés et RE2020 sont complémentaires, il est capital de définir ces deux notions. Il existe en effet beaucoup de confusion sur internet à ce sujet et un rappel de connaissances est indispensable.
Qu’est-ce qu’un matériau biosourcé dans la construction ?
Les matériaux de construction écologiques ou biosourcés sont des matériaux naturels, dont l’utilisation intervient en remplacement de matériaux très artificiellement manufacturés. On peut prendre l’exemple de l’isolant, où l’un des matériaux biosourcé de choix est la laine de bois. L’isolant laine de bois peut en effet avantageusement remplacer des produits à l’élaboration très énergivore, comme la laine de roche.
Comme le rappelle un texte du Ministère de la Transition Écologique, les matériaux biosourcés sont issus de la biomasse ou du recyclage de cette dernière. On ne peut donc pas considérer le recyclage de matériaux artificiels comme un nouveau matériau biosourcé.
De manière générale, les matériaux biosourcés sont présents dans de très nombreux domaines de la construction :
- Isolation.
- Couverture.
- Gros œuvre.
- Peinture (argile par exemple).
- Enduits.
Ils peuvent intervenir en remplacement de matériaux artificiels à la fabrication énergivore ou en complément de ces derniers. On peut prendre pour exemple l’enduit à la chaux qui ne contient ni solvant, ni COV (composés organiques volatils) ni biocide (ensemble de produits destinés à détruire, repousser ou rendre inoffensifs les organismes nuisibles, à en prévenir l’action ou à les combattre, par une action chimique ou biologique). On peut vous recommander par exemple d’utiliser l’enduit à la chaux de chez Alsabrico.
Les principaux axes de la norme RE2020
La RE2020 (Réglementation Environnementale 2020) intervient en remplacement des anciennes RT (Réglementations Thermiques), dont la dernière itération datait de 2012. On évoque également, par abus de langage, la RT2020, car les habitudes changent lentement.
Cette norme très ambitieuse concerne les constructions neuves et les extensions. Là où la RT2012 imposait la construction de bâtiments globalement basse consommation (sigle BBC), la RE2020 engage la construction de bâtiments à énergie positive, les BEPOS. Les bâtiments construits après entrée en vigueur de cette norme doivent donc produire plus d’énergie qu’ils n’en utilisent. On privilégie donc :
- Une très forte isolation thermique.
- Des équipements peu énergivores (pompes à chaleur).
- Optionnellement des panneaux solaires.
Sachez également que la RE2020 va encore plus loin et cadre également :
- Le confort en été : L’isolation thermique doit désormais concerner autant l’hiver que l’été. Avec le changement climatique et la hausse des températures, conserver un logement frais en été sans climatisation est un enjeu de très grande importance.
- L’énergie grise des matériaux et équipements : L’énergie utilisée par les matériaux de construction et les équipements au cours de leur cycle de vie (fabrication, réparation, démantèlement). Un calcul est imposé par la RE2020 afin de prendre en compte ce critère nommé IC Composants, étendu à un calcul plus ample pour le IC Construction.
- L’impact sur le changement climatique : Il s’agit de l’indice IC Bâtiment qui fait intervenir des calculs très détaillés.
Il existe d’autres éléments, présents dans la RE2020, mais ils relèvent d’explications bien plus complexes.
Quels avantages pour les matériaux biosourcés dans la construction ?
Grâce à leur faible énergie grise les matériaux biosourcés s’avèrent une solution particulièrement adaptée au respect de la RE2020. Voici quelques domaines (non exhaustifs) où la construction biosourcée peut briller et apporter une réelle plus-value.
Des matériaux à empreinte carbone ou énergétique réduite
Les matériaux biosourcés sont, en tout premier lieu, des produits naturels qui permettent d’éviter les émanations de COV (Composés Organiques Volatiles) et proposent un mode constructif alternatif.
Ensuite, les matériaux biosourcés sont tout indiqués pour respecter la RE2020 car ils bénéficient d’entrée d’une très faible empreinte énergétique, parfois même sous 100kWh/m3. On peut ainsi satisfaire aux exigences de la RE2020 tout en faisant un geste supplémentaire pour l’environnement. Notez que l’énergie grise est un concept encore mouvant, qui nécessite toujours une définition claire de la part des services publics et des acteurs du bâtiment.
Enfin, il faut rappeler que les matériaux biosourcés ne sonnent pas nécessairement le glas de la construction traditionnelle, il est tout à fait possible de respecter la RE2020 avec des parpaings et une isolation en laine de bois.
Bon à savoirPour l’exemple, on estime que l’énergie grise de la laine de bois est d’environ 50kWh/m3 contre 150kWh/m3 pour la laine de roche et 1 100kWh/m3 pour le polyuréthane projeté. (Chiffres Ecoconso)
Des solutions très performantes
RE2020 et matériaux biosourcés sont intimement complémentaires car ces derniers offrent des performances modernes. On évoque cette comptabilité très souvent pour les isolants naturels qui sont les matériaux biosourcés les plus utilisés dans la construction. On peut ainsi entièrement remplacer les isolants traditionnels et même les plus novateurs par des matériaux naturels.
Pour l’exemple, on peut envisager des combles isolés avec de la mousse polyuréthane projetée. Pour satisfaire aux exigences de la RE2020, on projette en moyenne 25 à 30cm de mousse polyuréthane. Afin d’atteindre les mêmes performances d’isolation en hiver, on peut remplacer le polyuréthane par 36 à 46cm de laine de bois.
Le seul inconvénient de cette situation est la perte de place, qui est peu importante en regard des avantages. En effet la laine de bois est non seulement naturelle, mais elle offre une protection contre la chaleur extérieure durant l’été largement supérieure à celle du polyuréthane.
Enfin, pour conclure avec cet exemple, l’énergie grise de cette masse de polyuréthane est d’environ 55kWh/m², alors que pour la laine de bois ce chiffre tombe à 20kWh/m². Sur une surface de 100m² cela représente 3 500kWh économisés.
La RE2020 favorise-t-elle les matériaux biosourcés ?
Pour autant, on ne peut pas dire que la RE2020 favorise les matériaux biosourcés, car ils demeurent plus faiblement utilisés dans la construction que les matériaux traditionnels.
Les matériaux les plus utilisés dans une construction RE2020
La France est une nation qui construit en béton, contrairement à de nombreux autres pays européens, qui privilégient le bois. On souligne parfois que le gros œuvre est plus facile à décarboner que le second œuvre, mais nous pensons qu’il s’agit d’une affirmation qui mérite une étude approfondie. Dans le résidentiel individuel, il semble au contraire plus aisé de décarboner le gros œuvre (ossature bois, construction paille, béton de chanvre) que le second œuvre et ses postes très manufacturés, comme l’électricité, les communications et la plomberie.
Quoiqu’il en soit, les matériaux les plus utilisés par les bâtiments RE2020 sont les éléments béton pour gros œuvre, les isolants synthétiques (polyuréthane et laines minérales) et autres.
La part de la construction ossature bois représente environ 11% du marché dans le domaine de la construction individuelle, un chiffre qui, s’il est en augmentation, reste bien en dessous de celui de la construction traditionnelle.
Quels sont les matériaux biosourcés à envisager pour un bâtiment RE2020
Tous les matériaux biosourcés sont indiqués pour une construction RE2020. On peut toutefois préciser cette affirmation en soulignant certaines solutions constructives biosourcées.
- La construction ossature bois : Cette construction, qui plus est si elle engage du bois français, permet de réduire considérablement l’empreinte énergétique d’un logement.
- L’isolation végétale ou animale : L’enveloppe thermique du bâtiment en laine végétale ou en laine animale (mouton) permet de réduire l’impact carbone tout en bénéficiant de performances globalement plus élevées.
- Le béton de chanvre : Une solution de gros œuvre, de chape ou de doublage particulièrement efficace, pérenne et agréable à vivre grâce à ses propriétés hygroscopiques.
- La construction paille : Un mode constructif innovant, 100% made in France qui engage l’énergie grise la plus faible du toutes les solutions de gros œuvre.
D’autres solutions sont également envisageables, comme la construction adobe, mais elles restent pour l’heure peu fréquentes en France, hors autoconstruction.
Comment les professionnels peuvent-ils mieux envisager les matériaux biosourcés ?
Si les matériaux biosourcés sont idéaux dans une construction RE2020, pourquoi ne sont-ils pas plus utilisés ? La progression des matériaux de construction naturels reste assez lente en France, pour des raisons que l’on peut évoquer rapidement. Soulignons avant tout que les habitudes, notamment en termes de construction, nécessitent du temps pour évoluer et doivent en premier lieu conquérir le cœur de la clientèle.
Une grande nécessité de formations
Il existe une pléthore de livres blancs et de formations spécialisées dans les matériaux biosourcés disponibles pour les constructeurs. Toutefois, il faut faire face à une spécificité bien française : les formations ne sont pas toujours populaires auprès des artisans. Pire encore, les formations représentent au mieux une dépense (un investissement), et fréquemment un manque à gagner temporaire. Il faut en effet dégager du temps pour se former, découvrir les produits, rencontrer de nouveaux fournisseurs et s’habituer à des processus nouveaux. Tout ceci représente du temps non travaillé pour les artisans ou les employés des constructeurs, avec pour conséquence :
- Un manque à gagner financier immédiat.
- Un retard éventuel pour la clientèle.
D’autre part, toute formation est un investissement qui doit être rentabilisé, on n’effectue en effet ce geste que si la demande côté clients est importante. Pour l’instant, les Français peinent à rejoindre le wagon des maisons naturelles, sauf dans l’autoconstruction, où la part de matériaux naturels est très importante.
Enfin, sachez que de nombreux artisans préfèrent continuer avec du traditionnel, car ils en connaissent les avantages et la durabilité et préfèrent proposer à leurs clients des solutions dont ils sont certains de la pérennité sur le long terme.
Une maîtrise des coûts à améliorer
Pour terminer il faut souligner l’inconvénient majeur des matériaux biosourcés, leur coût. En effet, les matériaux naturels, ne bénéficiant pas des mêmes économies d’échelle, ont un prix supérieur à celui des matériaux classiques.
On peut prendre l’exemple de la laine de roche et de la laine de bois à souffler, la première se négocie entre 55€ et 65€/m3 (hors remise fournisseur) tandis que la dernière coûte de 60€ à 80€/m3.
De la même manière, les plaques Fermacell, qui sont considérées comme biosourcées par cette marque (avis à débattre) coûtent entre 13€ et 16€/m² tandis que les plaques de plâtre BA13 standard ont un prix allant de 5€ à 10€/m².
Il existe ainsi une différence de prix certaine qui freine la pénétration des matériaux biosourcés dans la construction moderne, le tout dans un contexte économique peu favorable au changement.
Pour aller plus loin